Le greenhushing : comprendre ce nouveau phénomène

Temps de lecture : 5 min

Ecrit par Violette Demain

Il y a environ quinze ans, le terme "greenhushing", également désigné sous les noms d'éco-silence ou de mutisme vert, a été introduit par le site américain spécialisé dans l'environnement et la durabilité, TreeHugger. Toutefois, ce n'est que récemment que ce concept a commencé à susciter un véritable intérêt. Le greenhushing peut être considéré comme une réponse au problème bien connu du greenwashing, une pratique couramment adoptée par les entreprises pour exagérer ou embellir leurs engagements environnementaux, donnant ainsi l'impression d'être plus vertueuses qu'elles ne le sont réellement. Au lieu de mettre en avant de manière excessive leurs efforts environnementaux, certaines entreprises font consciemment le choix de garder le silence sur leurs actions, voire sur leur inaction, en matière de durabilité. Selon le rapport 2022 de South Pole, ce problème concerne environ 25 % des grandes entreprises du secteur privé qui, malgré les engagements pris, ont fait ce choix de ne pas les communiquer.

 

1)    Les causes

Plusieurs raisons expliquent le greenhushing.

●      Certaines entreprises choisissent de garder le silence au sujet de leurs actions environnementales, car elles n’ont simplement aucune action mise en place ou se contente du strict minimum comme par exemple financer la replantation d’arbres quelque part sur la planète pour compenser leurs émissions de carbone. Cette attitude passive leur permet ainsi de masquer l’absence de mesures concrètes.

●      Pour d’autres entreprises, c’est la peur d’être critiquées de ne pas en faire assez ou de ne pas réussir à atteindre les objectifs et engagements communiqués.

●      Enfin, certaines entreprises, malgré leur sincérité, préfèrent ne pas communiquer sur leurs engagements, craignant d’être perçues comme des opportunistes ou être accusées à tort de faire du “greenwashing”.

 

2)    Les conséquences

Les conséquences du greenhushing sont assez graves. Tout d’abord, ce manque de transparence nuit à la confiance du public et complique sérieusement la prise de décision éclairée. De plus, lorsque les entreprises choisissent de taire leurs actions environnementales, qu’elles soient de petite ou grande envergure, elles négligent leur responsabilité d’agir et leur rôle dans la sensibilisation de la société aux enjeux climatiques. A long terme, cette attitude entrave les progrès vers l’atteinte des objectifs mondiaux tels que ceux définis dans l’Accord de Paris sur le Climat ou les Objectifs de  Développement Durable des Nations Unies.

 

3)    Les solutions : nécessité de la transparence et de l’action

Pour lutter contre le greenhushing, la transparence est essentielle. Les entreprises doivent rendre compte de leurs actions environnementales, qu'elles soient positives ou négatives. Cela permettra au public de faire des choix éclairés et de mettre la pression sur ceux qui ne prennent pas leurs responsabilités environnementales au sérieux. Même si elle peut effectivement exposer à la critique, la transparence reste toujours plus préférable que le silence. Aucune entreprise n’est immédiatement parfaite. Et ce point peut tout à fait être entendu par le public si la communication est sincère, précise, factuelle et sans arrière-pensée manipulatoire. Les entreprises doivent donc adopter une communication responsable c’est-à-dire encourager les actions concrètes, dire ce qu’on fait, mais également ce qu’on ne fait pas ou ce qu'il reste à faire. Donnez des chiffres, des échéances et communiquez sur les réussites et échecs. Montrer qu’on essaie de s’améliorer restera toujours mieux que de le cacher et cela pourra même pousser d’autres à essayer à leur tour et donc encourager et inspirer d’autres entreprises à prendre le pas.

 

Conclusion

En fin de compte, le greenhushing représente un obstacle majeur pour la transition vers un monde plus durable. Il est essentiel que les entreprises adoptent une approche transparente et sincère en ce qui concerne leurs actions et leurs engagements environnementaux. La solution n’est pas de communiquer moins mais de communiquer mieux ! Il est donc temps de dépasser ce phénomène grandissant, et que les entreprises prennent leur responsabilité au sérieux pour inspirer un changement positif. C'est ainsi que nous pourrons sensibiliser et encourager l'ensemble de la société à agir en faveur d'un avenir.


Sources :

Jules Thomas, 08/05/2023, L’argot de bureau : le « greenhushing », le silencieux contraire du « greenwashing », Le Monde.

30/05/2023, Le greenhushing, un succédané du greenwashing qui commence à proliférer, Le Blog du Communicant.

Tiphaine Bühler, 27/04/23, Greenhushing: parler de durabilité est-il devenu un tabou?, PME.

Nadia Kähkönen, Elliott Bourgeault, Isabel Hagbrink, 2022, Net Zero and Beyond : A deep-dive on climate leaders and what’s driving them, South Pole.

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